Après la présentation d’un premier projet de résidence insatisfaisant architecturalement, un deuxième projet a été présenté lors d’une réunion de restitution. Beaucoup de questionnements demeurent.
Les chiffres de la concertation pour le projet de résidence au 14 avenue du Maréchal-Lyautey, sur un terrain de 2300 m², sont parlants, et ont été détaillés en ouverture de réunion publique, mardi 21 novembre, par l’élue à la démocratie participative, Héloïse Gerber. En un an, ont eu lieu 5 temps participatifs publics (2 réunions de concertation, 1 visite du site, 2 réunions de restitution) ainsi que pas moins de 25 rendez-vous avec les riverains et collectifs d’habitants. Le projet a aussi amené une étude phytosanitaire, un diagnostic écologique, la consultation de l’architecte des Bâtiments de France... Rappelons qu’il s’agit d’une vente de privé à privé, le nouveau propriétaire, Loger Habitat et PL Partenaires, ayant accepté la demande de la mairie de mener une concertation.
L’adjointe a ensuite souligné que le premier projet n’était pas satisfaisant, notamment en termes de hauteur et d’esthétisme, et que la copie avait été revue, d’où cette nouvelle réunion. Enfin, elle a précisé : « Il y a des frustrations mais le projet serait moins bon si on n’avait pas pris en compte tous les avis et les propositions ».
Habiter en ville, un compromis
Nicolas Burlion, élu à l’urbanisme, a ensuite présenté le contexte urbain et de transition écologique à Lambersart. « Nous sommes en ville pour certaines raisons, il y a des avantages, l’accès à l’emploi, aux services, aux commerces, aux transports en commun, une vie associative et culturelle riche. Habiter Lambersart permet souvent d’être au plus près de son lieu de travail à Lille. Mais il y a aussi des contraintes : la densité, la pollution, la difficulté de mobilité, le stationnement… C’est un compromis. » Il a rappelé que l’habitat était responsable de 19 % des émissions de gaz à effet de serre et la voiture de 20 %, avant d’estimer : « C’est un enjeu de justice sociale de permettre à chacun de résider dans un habitat adapté aux bouleversements climatiques qui s’annoncent ». L’élu a aussi résumé les actions en faveur de la nature en ville, tout en soulignant la nécessité d’arrêter l’artificialisation des terres agricoles. Plus tard dans la réunion, il a ajouté que « Lambersart perd des habitants et a besoin de logements, pour ses jeunes, ses aînés, ses familles, ses étudiants ».
C’est Thomas Loiez, le nouvel architecte missionné par les propriétaires, qui a alors présenté le projet. « Il a été retravaillé en intégrant au maximum les éléments de la concertation ». La hauteur de la résidence diminue, elle passe d’un R+4+attique à un R+3+attique et son aspect architectural et esthétique a été modifié. Rappelons que le Plan Local d’Urbanisme permettait une élévation en R+6.
Un cahier des charges respecté
Sur le sujet de la transition écologique, l’emprise au sol de la résidence représente 38 % du terrain. Le projet préserve 4 arbres remarquables sur le site, prévoit la suppression de 34 arbres, dont une bonne partie en mauvais état, remplacés par 34 nouveaux sujets de haute tige. Le parking en sous-sol compte un niveau au lieu de deux précédemment, pour ne pas bouleverser le terrain. De plus, le bâtiment est construit aux normes RE2020, ce qui impose notamment un bilan carbone performant lors de la construction et un chauffage avec pompe à chaleur et panneaux solaires
S’agissant de l’architecture et l’intégration dans le quartier, outre la limitation de la hauteur du bâtiment, les toitures terrasses sont végétalisées, des bacs plantés sur les terrasses des appartements, en épannelage sur le côté gauche, permettent de préserver l’intimité et de limiter les vis-à-vis, « la façade sur la rue présente des variations pour casser l’effet imposant du bâtiment », le parking aérien est planté et perméable. Les matériaux choisis sont de la brique et du béton blanc.
Concernant les usages et la vie de quartier, le projet contient une grande proportion de logements T3 ou plus, pour respecter la demande de logements familiaux. Il y a à l’arrière de la résidence, dans la seule partie préservée de la maison existante actuellement, un local à vélo. L’idée de maison médicale ou de crèche au rez-de-chaussée n’a pas été retenue pour ne pas accroître les besoins en stationnement temporaire. Et « l’accès par une porte cochère sous le bâtiment permet de préserver la sécurité », a noté l’architecte.
Les désaccords demeurent
Les remarques, critiques et questions ont ensuite fusé dans la salle. Des participants ont estimé que les esquisses montrées présentaient une perception faussée, avec une avenue semblant plus large qu’en réalité et une hauteur du bâtiment semblant, elle, réduite. Conséquence : « On ne peut pas bien juger ». Certains ont cependant tout de suite jugé que le projet ne leur convenait pas, ce sont les habitants des maisons avenue Picavet, dont le jardin donne sur la résidence. Comme l’a résumé l’un d’entre eux : « C’est moins laid que le précédent projet, mais les habitants de la résidence ont toujours une perspective sur nos jardins ». L’architecte a émis la possibilité de pouvoir supprimer ces vues. Cela n’est pas suffisant pour certains : « C’est la logique et la nature du projet qui choque ici, dans une rue où on ne peut pas se croiser, dans un endroit verdoyant, sur un petit terrain de 2000 m2… Il aurait fallu seulement quelques appartements ». Une personne a ajouté que le projet présentait une artificialisation importante sur une petite parcelle : « L’eau va aller où ? » Antoine Pierrot, adjoint à la transition écologique, a tenu à la rassurer : « Cela ne va pas changer le comportement de la nappe phréatique et des écoulements ».
Les participants ont aussi regretté que le pignon droit du bâtiment, orienté sud, soit aveugle, mais l’architecte comme les élus ont expliqué qu’il n’était pas réglementaire d’y réaliser des ouvertures puisqu’il donne sur un terrain privé et constructible. Une habitante a été plus loin en demandant un sursis à statuer sur le futur permis de construire en attendant en attendant des éventuels changements dans le nouveau Plan Local d’Urbanisme (PLU3) au lieu d’appliquer les règles du PLU2.
Enfin, la question de la circulation dans cette avenue qui débouche sur la très passante avenue Delécaux a été discutée et l’idée de la mise en place d’un sens unique émise : Gilles Dumez, adjoint à la mobilité, a donné son accord pour réfléchir à l’avenir sur ce secteur, comme cela a déjà été fait dans d’autres quartiers.
Une décision guidée « par l’intérêt public »
En conclusion, dans une volonté d’apaisement, Nicolas Burlion a souligné qu’il ne s’agissait que d’un « avant-projet », que des prescriptions pouvaient encore être faites et que l’architecte des Bâtiments de France donnera son avis sur le permis de construire après avoir déjà été consulté pour cet avant-projet.
Nicolas Bouche, maire, a pris plus longuement la parole. Il a rappelé : « Les maires ont peu de pouvoir, le droit de la propriété privée en France est très protecteur, vous pouvez faire ce que vous voulez sur votre terrain si vous respectez la loi. Si le maire dit non, le propriétaire va au tribunal et gagne la plupart du temps. Le seul poids du maire, c’est sur l’esthétique. C’est là-dessus que je me suis appuyé pour refuser le premier projet présenté ». Il a ensuite souligné : « Je suis là pour défendre les Lambersartois, d’aujourd’hui et de demain, pas les promoteurs. Ce qui va guider notre décision sera toujours l’intérêt public, pas les intérêts privés, même si je comprends que vous vous battiez. Etre élu c’est faire des choix ». Sur le fond du projet, il a conclu : « Je trouve qu’il y a une amélioration esthétique, mais je n’ai pas tous les éléments. S’il s’avérait que pour le bien des Lambersartois, il fallait que je sursoie au projet, je surseoirai. Si c’est dans l’intérêt public, je le signerai. »